Définition de LENT, ENTE
Prononciation : lan, lan-t'
DÉFINITIONS
1
Proprement, souple, flexible, sens qui est un latinisme rarement usité et seulement en poésie. À moins qu'avec adresse un de ses pieds lié Sous un cuir souple et lent ne demeure plié, A. CHÉN., Idylles, Fille du vieux pasteur.Que son cou faible et lent ne soutient plus sa tête
de André CHÉNIER dans Fragm. de l'art d'aimer.
2
Par un passage du sens de flexible à mou, faible, qui n'agit pas avec promptitude, qui tarde, en parlant des personnes. Il est lent dans tout ce qu'il fait, à tout ce qu'il fait. C'est un esprit lent.[Antiochus] Un peu trop lent peut-être à servir ma colère
de Pierre CORNEILLE dans Rodog. IV, 3
Mangez-le vite [l'agneau pascal], car c'est la victime du passage du Seigneur ; il ne doit y avoir rien de lent ni de paresseux dans ceux qui se nourrissent de la viande que Jésus nous a donnée
Je le trouvais trop lent à traverser l'Asie
de Jean RACINE dans Alex. I, 2
Mais que Phorbas est lent pour mon impatience !
Autant la nature nous a paru vive, agissante, exaltée dans les singes, autant elle est lente, contrainte et resserrée chez ces paresseux
de Georges Louis Leclerc, comte de BUFFON dans l'Unau.
3
Qui manque de promptitude, d'activité, qui tarde, en parlant des choses. Un poison lent. Une mort lente.L'état de mes affaires ne demande pas des remèdes lents
de Claude Favre de VAUGELAS dans Q. C. liv. III, dans RICHELET
[Une femme] le matin dans un repos lent et plein de mollesse, et le soir dans un soin frivole de ses ajustements et de ses parures
de Louis BOURDALOUE dans Dim. de la Sexag. Dominic. t. I, p. 423
Quatre boeufs attelés, d'un pas tranquille et lent, Promenaient dans Paris le monarque indolent
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Lutr. II
J'irais attendre ailleurs une lente vengeance ?
de Jean RACINE dans Andr. IV, 3
Cette même Agrippine Que mon père épousa jadis pour ma ruine, Et qui, si je t'en crois, a de ses derniers jours, Trop lents pour ses desseins, précipité le cours ?
de Jean RACINE dans Brit. I, 4
Moments trop rigoureux, Que vous paraissez lents à mes rapides voeux !
de Jean RACINE dans Bérén. IV, 1
Échauffez mes transports trop lents, trop retenus
de Jean RACINE dans Phèdre, IV, 4
Le bras de la justice, Quoique lent à frapper, se tient toujours levé
de Jean-Baptiste ROUSSEAU dans Odes, I, 12
Que ces moments, grand Dieu, sont lents pour ma fureur !
Les conseils des rois sont un sanctuaire, dont le temps seul ouvre le voile d'une main lente
Elle n'a rien de la vivacité italienne ; tous ses mouvements sont lents
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Ad. et Théod. t. II, p. 32
La vengeance est boiteuse, elle vient à pas lents, Mais elle vient
de Victor HUGO dans Hernani, II, 3
Sémantique : Terme de marine. Se dit d'un navire qui n'obéit pas assez vivement à l'action du gouvernail.
4
Sémantique : Terme de médecine. Fièvre lente, fièvre continue, peu intense dans ses symptômes, et qui suit une marche chronique. Souvent le mot fièvre lente est synonyme de fièvre hectique.Pouls lent, pouls dont les battements sont en nombre moindre que dans l'état normal. On le dit aussi quand la systole est plus prompte que la diastole.
REMARQUE
1
Lent veut à avec les verbes et dans avec les noms : lent à choisir, lent dans son choix. L'ancienne langue disait avec un verbe aussi bien lent de que lent à.HISTORIQUE
1
XIe s.Dist Oliviers : dehait [mal] ait li plus lenz
dans Ch. de Rol. CXLII
2
XIIe s.Virge [vierge] es et virge concevras ; Ne seies pas à croire lente
de WACE dans Vierge Marie, p. 43
Sur un cheval qui de courre n'est lent
dans Roncisv. 135
Mais trop vient lent, dame, vostre secours
dans Couci, VII
3
XIIIe s.Si que ne put mangier, tant fu et floible et lente
dans Berte, XLVIII
Repenties somes trop lent [nous nous sommes repenties trop tard]
dans Lai du trot
Ne soit l'ung d'aidier l'autre lent
dans la Rose, 4709
Soies lens à ire, et isnés [prompt] à misericorde
de Brunetto LATINI dans Trésor, p. 386
Et dame Mahaus [Mathilde], cui fu lent Que ele ait l'avoir des escrins
dans Fabliaux mss. p. 136, dans LACURNE
4
XVe s....Tel doit estre regent, Lent de punir, aux bons non faire ennui
de Eustache DESCHAMPS dans Des vertus nécess. au prince.
5
XVIe s.Il mourut en defaillant petit à petit, tant pour sa vieillesse que pour une maladie lente qui lui survint
de Jacques AMYOT dans Numa, 34
L'autre, lent et consideratif comme un Fabius, opina hazardeuzement
Humeurs froids, lents [tenaces], gros et glueux
de Ambroise PARÉ dans V, 2
ÉTYMOLOGIE
1
Wallon, lêne, lente (au féminin seulement) ; provenç. lent ; espagn. et ital. lento ; du lat. lentus, flexible, visqueux, lent.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
1
.... LENT, suffixe, en latin lentus, qui se trouve dans faeculentus, sanguinolentus, vinolentus, pestilentus, etc. ; il est considéré par Bopp (Gr. comp. §§ 20, 795) comme une altération phonétique du suffixe sanscr. vant, qui signifie pourvu de, muni de. Corssen (Beitr. p. 304) combat, et il a raison, cette théorie, et nie que le v devienne l en latin ; il pense que vant devient ent, qui se trouve dans cruentus, fluentus, etc. ; que l'l appartient à un suffixe précédent : pestilentus, de pest-il-entus, faeculentus, de faec-ul-entus, etc. ; et que le suffixe lentus ainsi formé s'est introduit dans sanguinolentus, vinolentus, où l'l est inorganique.